Menu
Libération

Shoah : un mémorial qui fâche

Article réservé aux abonnés
Shoahdossier
À Berlin, le monument dédié aux six millions de juifs assassinés par les nazis sera inauguré le 10 mai. Censé représenter la culpabilité allemande, il suscite la controverse.
publié le 6 mai 2005 à 2h04

A Berlin

Le champ de stèles en béton, grand comme quatre stades de football, laisse déjà les premiers touristes dubitatifs. Massés le long des barrières qui protègent encore le monument jusqu’à son inauguration, le 10 mai, certains hochent la tête, d’autres poussent de gros soupirs. Ces 2 711 monolithes gris sombre, posés tous les 95 cm et dont la hauteur varie de 0,2 à 5,5 mètres, sont donc censés représenter la «culpabilité allemande». Après dix-sept années d’un débat intense et parfois violent, le mémorial de l’Holocauste, dédié aux six millions de juifs assassinés par le régime nazi, a fini par voir le jour. En plein centre de Berlin. Entre la porte de Brandebourg et l’ancienne Gestapo, là où se trouvaient les anciens jardins des ministères nazis, avant de devenir le no man’s land du mur de Berlin. A deux pas du bunker où Hitler s’est suicidé. On ne pouvait pas trouver endroit plus symbolique. Trop gros, trop cher, trop esthétisant ? «Quoi que les Allemands fassent, ils le feront toujours mal», commente l’historienne Régine Robin, qui a fort bien résumé le débat autour du monument dans son ouvrage, Berlin chantiers.

Initié en 1988 par un groupe de citoyens autour de la journaliste de télévision Lea Rosh, le mémorial avait à l’origine pour but de rendre leurs noms aux victimes de la Shoah. L’association avait choisi le projet de Christine Jacob-Marks, qui consistait à graver sur une immense plaque de béton de cent mètres sur cent mètres les noms des 4,2 millions de victimes