Chaumont-sur-Loire envoyée spéciale
Déjà une grande cueillette de réminiscences ? Pour un Festival des jardins qui moissonne sa 14e édition, creuser dans le terreau de la mémoire ressemble fort à une pause. Roses d'autrefois, évocation du Giverny de Claude Monet, jardin du gamin sétois qu'a été l'artiste Richard Di Rosa... La question de la mémoire n'est pas évoquée comme un panorama historique érudit. Les souvenances sont piochées de manière sensorielle, subjective, comme autant de «madeleines» de Proust. En ne boudant aucun des plaisirs distillés par les cinq sens. Le souvenir n'est pas une matière palpable, solide comme une pierre ou un végétal, il plane sur un jardin comme une enfance tenace, comme un parfum têtu, victime de toutes les déformations. Comme une ombre, cet autre élément fondamental mais insaisissable qui hante les parterres. Deux parcelles confrontent d'ailleurs ces deux éléments : Jardin d'ombre et de bleu, intime, baigné de nuit secrète ; et Transparences, où les silhouettes de capucines, de dahlias et de tagètes sont tamisées derrière une toile blanche.
«C'est une étape, convient Jean-Paul Pigeat, conservateur du festival. Au-delà de cette mémoire des sens, il s'agit de montrer comment le vocabulaire du jardin se répète, et se renouvelle.» En attrapant la vague commémorative qui envahit ce début de XXIe siècle, il ne nie pas que ce thème autocultive aussi un bilan du festival lui-même. Mis en abyme, Chaumont regarde Chaumont, entre espace et temps.
Les émoi