Elle n'est l'héritière d'aucun grand nom, ses défilés légendairement zen regroupent une vingtaine de modèles quand les grosses cylindrées en enquillent au bas mot le double, elle fait partie du cercle très fermé des «membres permanents de la haute couture» (1), mais sa marque, créée en 1981, n'est diffusée dans aucune boutique, ses vêtements féminins comme masculins réalisés sur mesure ne sont vendus qu'au coup par coup, et par elle-même : plus que de petite entreprise, Adeline André parle carrément de «nanomaison de couture». D'ailleurs, c'est bien simple, et la belle dame à la bouche rouille et cheveux orange le dit tout de go, elle y fait tout (hormis le montage des vêtements, effectué par son unique employée permanente) : du dessin aux relations avec la presse, du choix des tissus jusqu'à l'envoi des invitations pour son prochain défilé, heureusement aidée ici et là par une poignée de fidèles...
Et pourtant, on est prêts à parier qu'en réunion spirite, à la question, «esprit couture es-tu là ?», la table indiquerait Adeline André pour médium. Parce qu'elle ne cesse d'inventer (les vêtements à trois ou quatre emmanchures où la fermeture se fait par le bras qui passe dans les manches successives, sans boutonnage , les pulls à «bords roulants» non remaillés à l'encolure , les «vêtements-boîtes» en melton, tissu de laine à la fois très épais et souple qui pose d'emblée la silhouette), parce qu'elle épate par ses coupes aussi virtuoses qu'épurées et ses finitions p