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Libération

Girodet Peau d'âme

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Le Louvre révèle l'oeuvre érotique et éthérée du peintre préromantique.
publié le 29 septembre 2005 à 3h29

L'anneau. Métallique, agrémenté d'une perle rouge, il orne l'oreille d'une splendide créature, dont la tête courbée aux cheveux tressés laisse s'épancher de longues boucles brunes. Bouche mi-ouverte, nez grec, le garçon, vêtu d'un seul châle rouge à franges noué aux hanches, se replie sur lui-même. Il enserre de ses bras les pieds d'un linceul blanc, dans une tension émotionnelle extrême. Ce fragment à l'oreille piercée d'Atala au tombeau (1808) a été choisi par Sylvain Bellenger, l'homme qui sait tout sur Girodet.

Responsable «de A à Y» (comme il dit) d'une exposition révélation formidablement bien accrochée, Bellenger a compris qu'une telle affiche avait un potentiel de nouvelle star, sur les murs d'une chambre de fan. L'anneau fonctionne comme celui du Nibelungen dans la Tétralogie de Wagner. Magique et maudit, il attire vers un art (décliné ici en une centaine de tableaux et dessins, dont un bon tiers inconnu des connaisseurs) d'une sensualité irradiante et un peu morbide, immatérielle, éthérée jusqu'au burlesque. Cet érotisme, Girodet, peintre ultralettré, le plaçait à l'origine de toute la peinture («C'est le fils de Vénus / Oui, c'est lui qui jadis dans l'antique Argolide / D'une jeune beauté guida la main timide...», écrivait-il). Saturant ses toiles de références absconses, synthétisant toutes les interprétations, Girodet, dans son actualité érotique, est à chercher du côté de Matthew Barney.

Le rai (de lumière). Arrivé au Louvre depuis une obscure église de Haute-Gar