Le romancier anglais John Fowles est mort samedi des suites d'une longue maladie, a indiqué hier son éditeur, Random House. Il avait 79 ans. Pour beaucoup de lecteurs, Sarah et le lieutenant français reste son meilleur livre. Le film romantique qu'en a tiré Karel Reisz en 1981, sous le titre de la Maîtresse du lieutenant français, avec Meryl Streep en figure de proue et Jeremy Irons, sur un scénario de Harold Pinter, a probablement contribué à en fixer le souvenir. Après l'Obsédé, le Mage et Daniel Martin, c'est le quatrième roman de Fowles, publié en 1969 (traduit en France en 1972 aux éditions du Seuil), et son plus grand succès : ainsi vont les histoires d'amour en général. Mais celle que raconte John Fowles n'est pas si simple, pas seulement parce qu'il lui donne deux dénouements, l'un heureux, l'autre non.
«Je t'aime.» Si l'on se réfère à la définition qu'Umberto Eco a donnée du postmodernisme, à savoir qu'on ne dit plus «Je t'aime» dans la littérature du XXe siècle, mais «Je t'aime comme dans un roman de Barbara Cartland», alors Sarah et le lieutenant français est à la fois un fleuron du postmodernisme et un vertigineux exemple d'intertextualité.
John Fowles, contemporain du Nouveau Roman, disait volontiers que le discours sur la fiction primait désormais sur la fiction elle-même. Se livrant à une attaque précise de la société victorienne, il fait de Sarah une femme victime (déshonorée par le lieutenant), puis émancipée, en somme peu responsable de la passion destructric