A Berlin
C'est donc cela l'Allemagne, juste une tache d'herbe écrasée au milieu d'une prairie. L'affiche de l'exposition de l'agence de photo berlinoise Ostkreuz a l'air inoffensive. Et elle est pourtant sanglante. Tout comme cette mémé judoka, ou ce chien de secours posté en haut de ruines. C'est quoi l'Allemagne d'aujourd'hui ? C'est quoi ce pays qui ne s'autorise pas à devenir une nation à part entière à cause de son passé nazi, et qui est pourtant redevenu depuis quinze ans une entité géographique ?
Fondée juste après la chute du Mur en 1990 par sept photographes est-allemands de renom, l'une des rares agences encore indépendantes, qui fournit depuis quinze ans des photos aux journaux du monde entier, pose un regard redoutable sur l'Allemagne réunifiée. Un regard qui se passe des clichés sur le néonazisme, les grosses Mercedes, la bière et les saucisses. Mais qui n'est pas moins glaçant.
Pureté.
Originaires de l'Est ou de l'Ouest, âgés de 24 à 64 ans, les dix-sept photographes d'Ostkreuz «l'agence Magnum de l'Est», comme on l'appelle ici ont utilisé leurs appareils comme un scalpel. Qui peut encore ignorer que l'Allemagne est en train de devenir un pays de vieux ? La photographe Ute Mahler les appelle même les «nouveaux vieux», tous ces gens qui rêvent de se réaliser sur le tard, tandis que les enfants d'une autre artiste, Anne Schönharting, eux, sont les premières victimes de la fin de la prospérité allemande.
Ne cherchez pas chez Ostkreuz de signe d'Ostalgie. La RDA s'e