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Libération
Critique

Quand McCullin célèbre la magie noire.

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publié le 21 décembre 2005 à 5h03

Presque tout le village est là, au moins vingt-cinq jeunes gens, y compris des bébés, qui dévisagent le photographe, Don McCullin. Beaucoup font des grimaces, car ils ont le soleil dans les yeux. Au premier plan, malicieuse, une fille couverte de bijoux sourit. Derrière, on aperçoit les huttes sur pilotis de l'ethnie Dassanech qui ressemblent aux soucoupes volantes des films des années yéyé. Cette photographie de groupe extraite de Don McCullin en Afrique résume bien l'atmosphère de ce livre purement magique, d'une simplicité qui laisse baba, et qui rappelle combien ce reporter britannique, né le 9 octobre 1935 à Londres, cultive l'art du regard lucide.

«Vulnérable». Loin des conflits qui firent un temps sa réputation, et qui le laissèrent silencieux comme il le confiait à Frank Horvat en août 1987 (1), Don McCullin poursuit ses reportages. Ici, en Afrique, particulièrement en Ethiopie où il a voyagé en 2003 et 2004 pour immortaliser les tribus sédentaires et nomades, des Benes aux Mursis qui vivent au sud, à trois jours de route d'Addis-Abeba, près de la frontière soudanaise.

De temps en temps, raconte le photographe dans la préface, résonne «le bruit des balles de AK-47 [...]. Le conflit dans le sud du Soudan est proche, et tous les hommes sont armés jusqu'aux dents. On se sent vulnérable». Les kalachnikovs et autres pétards que certains hommes portent dans leurs bras tels des trophées signent cette Afrique contemporaine. Sinon, en apparence, quel paradis, c'est l'aube de l'