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Libération
Critique

La marque à corps perdus

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publié le 13 janvier 2006 à 20h03

C'est au sommet de l'immense magasin Vuitton des Champs-Elysées que Vanessa Beecroft expose son dernier travail. Au septième étage, dans un espace de quatre cents mètres carrés, désormais réservé aux «expressions culturelles», sont accrochées treize photographies. Soit les douze lettres qui forment le mot Louis Vuitton plus le monogramme LV. L'artiste, d'origine italienne et installée aux Etats-Unis, a composé un alphabet avec les corps de femmes nues. Lorsqu'elle parle de la prise de vue, Vanessa Beecroft reconnaît qu'elle «a aimé l'idée de forcer le corps des femmes, de les forcer à se mettre par terre de façon à former des lettres». L'expérience qui, précise-t-elle, ne lui a pas procuré «un plaisir particulier», aboutit à un résultat à la fois «doux et violent». «D'un certain point de vue, les modèles ressemblent aux pilastres d'un balcon à l'italienne ; d'un autre, on peut les voir comme les pièces d'un Lego.» Après sa performance pour l'inauguration du magasin en octobre, elle prolonge donc cette association inédite, osée, avec la marque tout en questionnant son ambiguïté. «Moi, comme artiste, cela ne me gêne pas de présenter mon travail dans une telle structure. Je ne suis pas tant que cela attachée aux musées. Même s'ils sont apparemment moins liés par l'économie, ils le sont ­ de façon plus subtile ­ à travers des mécènes ou des fondations... Ce travail est une sublimation de la violence des marques que les femmes subissent habituellement. C'est une autocritique, que