Les photographies de l'Algérie vue du ciel donnent l'impression d'un pays presque désert, avec de rares humains et peu de repères temporels. On pourrait y voir la principale raison du succès du nouvel opus aérien de Yann Arthus-Bertrand. Ainsi, telle mère en Algérie peut contempler sa demeure d'en haut, son fils immigré en France montrer à ses enfants son lieu de naissance, et le rapatrié français d'Algérie pleurer la maison de ses rêves. Chacun a la mémoire de son pays fragmentée par sa propre histoire, et a toute liberté d'utiliser les illustrations d'Arthus-Bertrand, comme les pages d'un album sur lesquelles on colle les photos de famille, avant de les recouvrir d'un papier cristal protecteur. Les textes du journaliste Jean Daniel et de l'historien Benjamin Stora, en ouverture, ne trompent d'ailleurs pas sur la marchandise. Le premier écrit : «...Je ne retenais de l'Algérie, depuis ma ville natale, chantée par Gide (Blida, petite rose, «Ourida»), que les magies de Tipaza et de Djemila, amoureusement célébrées par Camus.» Le second commence par : «Je n'avais jamais vu la ville où je suis né, Constantine, de cette manière. Une ville tout entière tassée au sommet d'un bloc...»
Esthétique sans drame. Premier chasseur d'images à avoir obtenu l'autorisation de mitrailler du ciel l'Algérie indépendante des militaires, Yann Arthus-Bertrand a eu le souci de l'équilibrer en cinq dimensions : bords de mer, villes, campagnes, montagnes et désert saharien. Face à la beauté et à la dive