Quel magazine peut publier dans un même numéro une interview de Pamela Anderson, la première page de la Métamorphose de Kafka annotée par Nabokov et un poster central où le corps d'une rousse, qui présente les signes d'une rigor mortis avancée, est sur le point d'être dévorée par des chats affamés ? A l'automne 2002, le numéro 3 d'Another Magazine offrait tout cela ; plus des diamants d'une valeur de 50 000 livres (73 320 euros) à gagner via un concours. Chaque parution de ce semestriel anglais fait se côtoyer l'art contemporain, des séries mode ultrasophistiquées, des dizaines de pages de pub, des interviews de people et une section littéraire de bonne tenue, sagement rangée à la fin des 450 pages du monstre. Il est distribué dans 43 pays et ses ventes atteignent 130 000 exemplaires (la moitié à l'étranger), ce qui, compte tenu du caractère assez pointu d'Another Magazine, est ce qu'on appelle un succès.
Sans critique. L'initiative en revient à Jefferson Hack, 34 ans, éditeur autodidacte : «L'idée de base était de construire un magazine qui ralentit, qui prend son temps, ce qui est un vrai luxe aujourd'hui.» Par ailleurs, s'il donne dix ou vingt pages de carte blanche à un artiste, le journal ne publie aucun commentaire critique sur l'actualité culturelle et ne cherche pas à imposer à ses lecteurs le dernier truc branché. «Je ne vais pas leur dire qu'ils doivent changer leur style de vie pour s'adapter à la mode du moment», explique Jefferson Hack. Deuxième marque de fabriqu