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Libération

Le beau de Cadix

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publié le 24 mars 2006 à 20h43

Cadix est un endroit où les femmes sont si belles qu'on a toujours l'impression qu'elles vont partir ; sans doute est-ce la ville qui leur communique cette beauté, cette pénétrante menace d'abandon ; elle aussi donne l'impression de s'en aller. Finalement elle est restée là, au bord de l'Atlantique, mais elle est ailleurs, loin, avec ses souvenirs d'aventure et d'expédition. C'est de là qu'on embarquait, jadis, pour conquérir le nouveau monde. Cadix se trouve probablement dans La Havane : l'Espagne a longtemps fini à Cuba et certaines villes semblent laisser leur coeur dans une île qu'elles ne connaissent pas. Il est facile de pleurer à Cadix en regardant la mer. Il suffit de penser à tout ce qu'on aurait voulu faire et à la beauté qui nous reste. Il y a quelques jours, ce n'est pas une femme, mais un homme qui a pleuré là-bas : l'acteur Jean Reno. La province venait d'en faire son fils adoptif. A la remise du parchemin faisant de lui un compatriote du poète Rafael Alberti, la célèbre brute internationale a versé quelques larmes sur sa famille et son destin : on le lisait, lundi dernier, dans le quotidien El País. A priori, rien ne devrait lier une ville à l'élégance si délicate et un acteur aux rôles si musculaires ; un lieu si plein de son passé et un distributeur de personnages aussi vidés par leur présent. Cadix, Jean Reno : le premier nom glisse sur le second comme la caresse d'une fée sur la peau d'un imbécile ­ ou comme la brise de mer sur un blockhaus encombré d'adol