Menu
Libération
Critique

Le design se sape

Article réservé aux abonnés
Des froufrous, des boutons, des installations... Empruntant à la mode ou à l'art contemporain, le design verse dans l'apparat. Résultat, la création étouffe un peu.
publié le 14 avril 2006 à 20h55

Milan envoyée spéciale

Un immense étal de sièges blancs, dans un espace immaculé, lumineux. Les fauteuils Pane Chair, du Japonais Tokujin Yoshioka, ressemblent à des brioches chinoises. Ils sont en polyester élastomère, moulés et soufflés comme des gâteaux. Des écrins extrêmement purs, douillets, légers. Au loin, derrière ce grand loft un peu irréel, une intense pluie de fibres plastiques, un brouillard. Quand on a traversé ce fog, apparaît, évanescent, un concept-car, blanc toujours : la Lexus L-finesse, de la marque haut de gamme de Toyota. Plus la peine de montrer une automobile dans sa forme, son confort et ses atouts technologiques, son design n'est ici qu'esquissé, cette luxueuse est enrobée dans une installation «artistique».

Ainsi, le Salon du meuble de Milan, qui s'est tenu du 5 au 10 avril, entre la Fiera à Rho-Pero et le off en ville, était lancé. Ou comment le design, d'année en année sur ce Salon international dominant, s'envole à tous vents. Attrapé par une brise légèrement arty ­ pour lui donner le sens qu'il n'aurait plus ? Par la surcommunication événementielle, comme en témoignent les pièces monstres des frères brésiliens Campana, chez Edra. Des caïmans ou autres octopus géants et tentaculaires, du superfétatoire qui fait disparaître processus, forme et contenu. Du show pour le show, un chant du signe du design ? Surtout, la tempête de la mode a fini par transmettre ses virus chichiteux et éphémères, et ses mauvaises manières de placer des body-guards en noir