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Libération

Imamura soleil couchant

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publié le 31 mai 2006 à 21h24

Shohei Imamura faisait partie du club fermé des doubles palmés d'or, ayant tiré le gros lot cannois en 1983 avec la Ballade de Narayama, et quinze ans plus tard avec l'Anguille. Mais il était tout sauf un cinéaste de palmarès consensuel. Imamura était le grand cinéaste du désir, et passa l'essentiel de son temps à observer la force démesurée des pulsions sexuelles. Au point qu'il ne doit pas exister d'autre filmographie multipliant ainsi les signes de l'ardeur : Désir volé, Désir inassouvi, Cochons et cuirassés, Désir meurtrier, le Pornographe, Profonds désirs des dieux... Jusqu'au bout, il est resté animé par ce génie insolent du stupre. En témoigne l'héroïne de son dernier film, De l'eau tiède sous un pont rouge (2001), Saeko, femme fontaine lâchant une cyprine qui rend miraculeuse la pêche au ruisseau sous sa maison.

Ruines.

Imamura naît en 1926 à Tokyo d'un père médecin. Au sortir d'un lycée réputé, il intègre une école technique afin d'échapper à la conscription. Etudiant en histoire occidentale à la faculté de Waseda, il vit la défaite du Japon comme une libération : «Quand l'empereur l'annonça à la radio, j'avais 18 ans, et c'était fantastique : enfin libres.» Jeune témoin d'un Tokyo en ruines, marqué par la pauvreté d'après-guerre, il est attiré par les voyous, les bars et leurs entraîneuses, tirant volontiers le diable par la queue. La virée aux putes restera la figure centrale de son cinéma, même s'il n'a jamais tourné son projet le plus personnel, sur les «quartiers