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Libération
Critique

Réinventer Duras, tâche aride

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publié le 13 juillet 2006 à 21h57

A Avignon

Où mettre les spectateurs ? En général, les «metteurs» en scène qui investissent le cloître des Carmes ne se creusent pas trop la cervelle : ils les mettent sur un haut gradin de six cents places d'un côté, le charme du lieu [voûtes blanches et haut clocher de l'église voisine] étant censé faire le reste.

Le dispositif imaginé par Eric Vigner a le double mérite de bousculer ces habitudes en respectant l'espace. Les spectateurs sont disposés en vis-à- vis sur chaque côté du cloître, et les premiers rangs collent à la scène, qui est à la fois surélevée et trouée, ce qui autorise aux acteurs des entrées et des sorties verticales. On est proche ­ presque de plain pied ­ et loin ­ le plateau est vaste ; à la bonne distance en somme pour écouter Duras.

L'illettré et «l'Ecclésiaste». Où se mettre par rapport au texte ? Cette question-là, Eric Vigner a plus de mal à y répondre. Avec l'oeuvre de Marguerite Duras, le directeur du Centre dramatique de Lorient poursuit un compagnonnage scellé par une mise en scène de la Pluie d'été en 1993 au Conservatoire. Il revient aujourd'hui à ce texte, dont la forme [un théâtre roman, avec une alternance de séquences narratives et de dialogues] tient beaucoup du scénario de film, ce qui n'est pas étonnant : la Pluie d'été est directement inspirée d'un film qui s'appelle les Enfants. On y retrouve la famille d'immigrés ­ italiens ? russes ?, c'est selon ­ qui habite Vitry et ne scolarise pas ses enfants. Dont cet Ernest