Los Angeles correspondance
«Comment tu me qualifierais ?» demandait Johnny Farrell au vieux philosophe préposé aux chiottes dans le casino argentin de Gilda.«Paysan», répondait le vieux sans hésiter. Glenn Ford est ce genre de vedette problématique. On ne l'aimait pas beaucoup, mais il figure dans trop de films qu'on aime pour que ce soit si simple. Véritable mont Rushmore de la masculinité américaine, en 1958, il fut élu acteur le plus populaire de l'année par les exploitants de salles aux Etats-Unis, venant de faire Cow-boy,la Dernière Torpille, la Vallée de la poudre et, l'année précédente, 3 h 10 pour Yuma. L'acteur est mort hier dans sa maison de Beverly Hills, à 90 ans. Il n'était déjà «plus là» depuis quinze ans. Son fils Peter avait investi la propriété et opérait un petit commerce de photos «dédicacées» en ligne. Il faisait aussi pétition pour qu'on rende hommage à son père aux oscars et a récemment écrit sa biographie.
L'image de Glenn Ford avait quelque chose de synthétique et d'élémentaire à la fois, à l'instar de son nom de métier : une compression de son impossible état civil (Gwyllyn Samuel Newton Ford !). Glenn. Ford. Vallon. Gué. Difficile de faire plus simple ni plus américain, et, même s'il est né à Québec, Ford est Californien jusqu'à la moelle. Un nom parfait pour une bête à westerns, en tout cas : il en fera une bonne vingtaine.
Son physique aussi était composite, mélange incommode entre animal et minéral, bestial