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Libération
Reportage

Harar, une ville de poètes

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Un rocher mystique, des hyènes par dizaines, les fantômes de Rimbaud et de Corto Maltese, ce ne sont pas les légendes qui manquent à Harar, cité mosaïque et ville sainte de l'islam.
publié le 15 décembre 2006 à 0h30

Harar envoyée spéciale

C'est un tort de réserver la notion de «légende urbaine» aux seules mégalopoles occidentales. Harar, ville éthiopienne située à trois cents kilomètres à l'ouest de la capitale Addis-Abeba, est le berceau d'histoires autrement plus riches que les crocodiles cachés dans les couloirs du métro new-yorkais. On peut s'y perdre à chercher le fantôme d'Arthur Rimbaud ou la silhouette massive de Corto Maltese, voire se faire peur avec le mythe des hommes-hyènes, tapis à la lisière de la ville. Pour une première immersion, dévalez depuis la porte d'Harar (jonction entre la nouvelle ville et l'ancienne) l'avenue jusqu'à la place Ferès Mégala, en prenant garde aux coups de sang des boeufs, parfois emballés, qui disputent le passage aux taxis brinquebalants. A partir de là, toutes les rues mènent à d'autres ruelles, et l'entrelacs est bientôt si serré que les voitures n'y pénètrent plus. La magie du jegol ­ du nom de la muraille qui entoure la ville­ peut opérer. Résonnent dans l'enceinte des noms que n'aurait pas reniés Tolkien : celui des cinq portes Assum, Argo, Suqutat, Badro, Asmaddin, ou encore des protecteurs de cette ville de l'Est éthiopien : Abadir, son fondateur, aux alentours de l'an mil, et Nûr, le bâtisseur du jegol, bien des siècles plus tard.

Multitude de voiles. La rue pentue des tailleurs est attirante, peut-être parce que s'y trouve le nombril d'Harar, un rocher aux pouvoirs mystiques. Elle a été baptisée Makina Girgir, en référence au cliq