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Libération

Hugo colombien

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publié le 6 avril 2007 à 7h03

Le 27 février 1881, on célèbre à Paris le 80e anniversaire de Victor Hugo. Louis Blanc et Anatole France ont voulu la cérémonie. Le président Jules Ferry rend visite à l'écrivain, il lui offre un vase de Sèvres, Hugo paraît à la fenêtre et salue la foule. Les enterrements symboliques ont leur filage et leur couturière : la mort est aussi l'acte des autres. L'apparition de Hugo, héros démocratique et républicain, se reproduit pendant quatre ans à chaque anniversaire. En mai 1885, il meurt. Ses funérailles sont un enjeu national et un événement de l'histoire de France. La Nation suit le corps que sa mémoire investit. Ensuite, peu à peu, la figure du grand écrivain disparaît de France et du monde. Depuis Sartre, aucun destin littéraire ne fixe plus les rêves et les fantasmes français. En Allemagne, Günter Grass tient presque le rôle ; mais il a pris la liberté de paraître indigne au seuil de la taxidermie : le prix Nobel germanique, la grande conscience au pas avant trépas, fait brusquement savoir que, comme tant d'autres, il aima le nazisme. Belle résistance de l'individu pissant sur fleurs et couronnes. Les Etats-Unis, eux, n'ont jamais aimé un écrivain au point de confondre son linceul et leur drapeau. Le Colombien Gabriel García Márquez, également prix Nobel, est sans doute le seul romancier à perpétuer la condition hugolienne d'enterré vivant. Sa complaisance épiscopale et ses apparitions soignées l'entretiennent. Né le 6 mars 1927, il publie en 1967 Cent ans de solitud