Rishikesh envoyée spéciale
Etablie sur les rives enserrées du Gange, là où le fleuve vénéré par les hindous dévale de l'Himalaya pour entamer son parcours jusqu'à Bénarès et Calcutta, la ville de Rishikesh (environ 100 000 habitants, ce qui, à l'échelle de l'Inde, en fait presque un village), conserve peu de traces de ce qui contribua, en Occident, à sa renommée sixties. Soit, au printemps 68, le séjour des Beatles dans l'ashram du maharishi Mahesh Yogi. L'épisode, vaguement connu, est surtout propice aux moqueries, puisque le yoga, la méditation transcendantale, la fumette de cigarettes qui font rire et les babas cool (toutes ces choses mises ensemble) dessinent la plupart du temps une moue ironique sur le visage des gens à qui l'on évoque l'affaire.
Ville sacrée, attirant depuis toujours des pèlerins hindous venus y faire des retraites spirituelles, Rishikesh s'est autoproclamée «capitale mondiale du yoga», ce qui l'enferme dans une certaine caricature «peace & love» destinée aux touristes et exploitée, comme il se doit, par les marchands locaux. Sacs rayés en toile de jute, grandes liquettes de crépon aux couleurs éclatantes, larges pantalons en coton indigo et tongs en tout genre forment, avec les pochettes de papier à rouler, la parfaite panoplie hippie. Il est d'ailleurs étrange de voir à quel point, à peine arrivés, nombre de jeunes Blancs, affublés de dreadlocks et d'une démarche hypernonchalante, adoptent cette allure aussi peu «couleur locale» que celle des Dupon(d-t