Qu'on se le dise, ce n'est pas en écoutant un album du groupe de rap la Rumeur qu'on va verser une larme ou se laisser tenter par un petit pas de danse. Quoique ce troisième album du groupe parisien, Du coeur à l'outrage, sorti la semaine dernière, est certainement le plus maîtrisé de leur carrière du point de vue musical, et d'une acuité rarement égalée jusque-là.
Les rappeurs ont ouvert leurs compositions à d'autres producteurs que leurs DJ attitrés, Soul G et Kool M, en invitant Demon, une des références de la musique électronique, Laloo et P.A.T. Après un deuxième album, Regain de tension, qu'ils concèdent avoir enregistré, il y a trois ans, dans un climat anxiogène, parce que dans l'attente d'un procès intenté par le ministère de l'Intérieur pour «diffamation publique envers la police nationale», ils reviennent avec un disque de trentenaires, qui met en parallèle «leurs désordres intérieurs et le désordre extérieur».
«Chaque CD définit un contexte», explique Ekoué, dans les locaux de leur propre label dans le XIXe arrondissement de Paris. «Avant que les émeutes nous donnent tristement raison, nous avions ressenti au plus profond de nos chairs, avec Regain de tension, que la situation n'allait pas rester en l'état, que les quartiers se réveilleraient et que ça brûlerait de partout.» «A l'époque, renchérit Hamé, ça n'était pas encore consensuel de remettre en cause l'usage politique de la police. Sarkozy était à son plus f