Meilleur est le méchant, meilleur sera le film : une scène réussie de ce produit exagérément bavard de Quentin Tarantino, Boulevard de la mort, est celle où Kurt Russell, cascadeur au rancart et tueur de femmes, séduit l'une de celles qu'il va hacher menu dans un cercueil de tôle froissée (le metteur en scène fait en sorte qu'on commence par l'en remercier, tant il nous venge du bruit qu'elles font). L'idiote est charmée : à cet instant, elle n'est plus son personnage, mais une fan de l'acteur. Leur dialogue est plein d'une sadique délicatesse : Tarantino l'offre à ce héros secondaire des années 70, comme il en a offert d'autres à d'autres revenants, John Travolta, Pam Grier, David Carradine. Il y a des jours où l'on aimerait avoir assez de talent pour remercier les personnages qui nous ont permis de vivre ; il y a des nuits où l'on préfère en manquer : lorsqu'on devine que ces personnages, en projetant leurs ombres sur nos draps et nos murs, nous ont sans doute empêché d'oublier de guérir.
A l'ombre des héros en fleurs, l'éternité recommence, avec ou sans pop-corn, et Tarantino poursuit sa recherche pop du temps perdu. Il y a quelques jours, Kurt Russell est à Cannes pour évoquer le film. Il a 56 ans, une taille moyenne, porte une chemise Hawaï, un jean simple, et se rappelle à peine sa dernière visite sur la croisette, «cet endroit insensé». Son visage est bronzé, solide, froissé à sec. Tout en lui est puissant, trapu et sans artifice. Il vieillit bien dans