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Libération

Leçons de frime

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«Guantanamo», «colgate», «caméra», «grippe aviaire», ce sont les pas du coupé-décalé, cette danse née dans les bars ivoiriens. Un mouvement qui déferle aujourd'hui sur la France.
publié le 29 juin 2007 à 8h34

Dans les boîtes de nuit, ça coupe et ça décale. A la Fête de la musique, devant le camion de plats antillais stationné Porte des Lilas, ça coupe et ça décale. Dans un bar de la rue Saint-Maur, une foule de jeunes blancs, noirs, chinois, arabes, coupent et décalent. Ils ont la main au-dessus de leur tête, semblent couper l'air un coup à droite, un coup à gauche. Le DJ No Joke chauffe les danseurs en exécutant chacun des pas scandés par le chanteur sur le vinyle : «Guantanamo», il danse comme s'il avait les menottes aux poignets ; «caméra», il place les mains devant le visage comme s'il filmait ; «bisou bisou», il envoie des bises avec les doigts pincés sur la bouche ; «colgate», il fait mine de se brosser les dents. Et le plus spectaculaire, «grippe aviaire», les danseurs semblent être pris d'une crise d'épileptie.

Liasses. La folie du coupé-décalé (écrit aussi couper décaler) déferle sur le Tout-Paris, après Abidjan, Dakar, Bamako et New York, suite à la diaspora d'Afrique de l'Ouest. Nés dans les maquis (bars clandestins de la communauté ivoirienne à Paris), dans les boîtes de nuit afro-antillaises, et créés par une bande de jeunes Abidjanais, la Jet Set, qui ont fui le coup d'Etat en Côte d'Ivoire en 1999, puis repris par les zougloumans ­ ces musiciens qui accompagnaient les manifestations étudiantes ivoiriennes ­ dans les boîtes d'Abidjan dès 2003, cette musique et ses 150 pas de danse sont depuis quelque temps popularisés en France grâce aux spectacles de l'humor