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Critique

Weegee à vif

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Arpenteur des bas-fonds de New York, spécialiste des faits divers sanglants, défenseur des marginaux et familier des vedettes de l'époque, le photographe Arthur «Weegee» Fellig, mort en 1968, est exposé à Paris, au musée Maillol, jusqu'à mi-octobre.
publié le 30 juin 2007 à 8h35
(mis à jour le 30 juin 2007 à 8h35)

Entrer dans l'univers de Weegee, c'est pénétrer dans celui du film noir, ou plutôt dans celui, moins édulcoré, du roman noir. A partir de 1935, ce petit homme né en Pologne en 1899 va en effet traîner avec son appareil grand format et ses flashs explosifs dans les bas-fonds de New York, sur les traces de faits divers sanglants. On ne compte plus les cadavres qu'Arthur Fellig, qui se fait appeler Weegee, va alors cadrer. Il y a ceux qui, tête renversée sur le sol, au milieu d'une mare de sang, n'offriront que leur corps sans identité, ou ceux qui, le visage tourné vers le ciel, livrent une bribe de leur personnalité. Par exemple, ce type dessoudé en 1940 sur un trottoir de l'East Side, sapé comme un condottiere, costume bien coupé, cravate de soie, et qui va désormais faire l'élégant en enfer.

Sans-grade. Les morts de Weegee ont souvent belle allure. Ils ne sont pas les seuls. Il y a aussi des vivants remarquables dans ses photos. Même des people. Ce Clark Gable de 1949 au visage ravagé, l'oeil vitreux, déjà misfit, «désaxé». Ou cette Ann, années 40, dit la légende, qui n'est autre qu'Ann Sheridan, au décolleté plus que généreux, à l'expression à la fois allumée et fatiguée, à la physionomie rectifiée par le temps, pli sous le menton, quelques rides au coin des yeux et de la bouche, plus humaine que dans Allez coucher ailleurs ! de Howard Hawks.

Weegee a sans doute pu accrocher ces stars après la parution, en 1945, de