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Libération

L'homme invisible

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publié le 6 juillet 2007 à 8h41

A quoi ressemble un homme qui n'existe pas ? Quiconque ne manque pas d'imagination finit par se le demander. Il n'est pas besoin de François Fillon pour ça ­ soi-même suffit : si on n'est jamais sûr d'exister tout à fait, on est certain de ne pas le faire comme on croyait ou comme on voudrait. Certains hommes agissent pour l'oublier. Ils n'ont pas forcément tort. La charrue avant les boeufs, pourvu qu'on la tire soi-même, c'est une façon de labourer. François Fillon est certain d'exister en tant que Premier ministre : c'est son titre, sa fonction. On doit le lui dire, le lui répéter, s'indigner autour de lui d'une presse idiote, superficielle, paresseuse, qui se réjouit d'en douter. Le Président Duracel doit même le lui souffler : «Ne les écoute pas, tu es Premier Ministre. Moi, je te le dis.»«A ce propos, je voulais te demander si...» «Laisse-moi finir.» Non, il n'est pas facile d'exister. Il est probable que la mauvaise foi des autres ne perturbe pas l'idée que François Fillon projette de sa propre existence. Pendant qu'ils causent, glosent et critiquent, lui, il agit. Il avance, élague, remet la France au travail et le travail à l'intelligence et à la grandeur du pays. «La France est grande... la France est grande...» répète-t-il lundi, pointant l'index droit vers le bas, comme on appuie sur un bouton magique. C'est le jour de sa déclaration de politique générale, celui où l'homme invisible ôte ses bandelettes. Dans un livre de slogans absurdes (1), H