(envoyé spécial à Avignon)
Quel calme! Des enfants chuchotent dans le noir avant de s'endormir. Inutile de tendre l'oreille, chaque syllabe se détache. Ils parlent néerlandais et l'on comprend, on jurerait qu'on lit sur leurs lèvres et non sur l'écran de surtitrage.
Musicalité. Ils sont des corps dans la pénombre, mais aussi des visages en gros plan, filmés en direct et projetés sur quatre écrans. Ils sont des acteurs répétant Hamlet dans un théâtre d'or et de velours, et il est difficile de ne pas succomber à la beauté formelle de Mefisto for ever, telle qu'offerte d'entrée et tenue jusqu'au terme du spectacle, trois heures trente et un entracte plus tard.
La sérénité que dégagent les acteurs du Toneelhuis d'Anvers, leur sobriété, leur art de dire avec le minimum, ont des vertus apaisantes. Spectacle sur le théâtre, Mefisto for ever est aussi - d'abord ? - une leçon de jeu. Qui n'est pas sans résonances avec celle qu'offrent les comédiens polonais de Krzysztof Warlikowski qui jouent Angels in America au lycée Saint-Joseph. Staccato, moderato, ce théâtre-là est hanté par la musicalité.
Le spectacle de Guy Cassiers, donné au théâtre municipal, n'a pourtant pas la portée de celui de Warlikowski. Sans doute parce que le fond n'atteint pas la sophistication de la forme. La pièce de Tom Lanoye est inspirée du roman de Klaus Mann, publié en 1936. Opposant exilé aux Pays-Bas et en France, le fils de Thomas Mann dénonce, dans Mefisto,