Ailleurs, le paradis est une farce, et ici, il est en solde. Vous revenez par exemple d'Inde, un endroit où la foule fait en vous un vide parfumé qui resterait presque paisible, si la paix pouvait entrer dans cette nerveuse opérette viennoise qu'est devenue la France. Vous apprenez dans Time que mère Teresa, la sainte de Calcutta, a écrit dans ses carnets posthumes qu'elle éprouvait quelque mal à croire en l'existence de Dieu. Les saints voient le vide et vous pensez qu'elle avait bien raison de ne pas croire, et encore plus de ne rien dire. Ce que vous voyez là-bas vous confirme dans l'idée que la seule croyance possible, la seule dignité, est d'avoir assez de sympathie en route pour ne plus croire en rien, et peu en vous. Dans un temple ou une rue indienne, vous n'êtes la preuve de l'existence que de ce qui vous entoure. Un regard, des émotions, quelque chose de nu, pendant une minute, une heure, trois jours, vous rendent transparent et perméable à la vie sous toutes formes : inutile de mêler Dieu à ça. Songeant à mère Teresa, vous allez à la Fnac pour acheter un roman de Dostoïevski ou de Bernanos : vous croyez vous rappeler qu'on trouve chez ces auteurs des personnages dont la foi est perpétuellement remise en cause par le vide épouvantable qu'ils éprouvent. Un stage en Inde les aurait peut-être calmés. Les dieux sont si nombreux que le vide y devient familier, soudain : comme une grande maison pleine d'ancêtres qui ne meurent pas et sont assez conviviaux pour évi
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