Une des qualités du metteur en scène Thierry Bédard est l'obstination, doublée d'une curiosité sans limite. Il a laissé de côté les traditions théâtrales non pour faire du neuf, mais de la recherche, du laboratoire. Artiste associé à Bonlieu, la scène nationale d'Annecy, il y mène des projets qui libèrent et font circuler les paroles plus qu'ils ne théâtralisent. Il travaille ainsi avec un jeune auteur maorais, Alain-Kamal Martial (30 ans), qui, entre autres activités, a créé à Mayotte l'IstaMbul théâtre. Ses textes et pièces sont des cris de révolte documentés relisant avec pertinence l'histoire de cette collectivité départementale française. Comme l'auteur est un actif qui mise sur la circulation des idées et des artistes (il travaille avec des Français, des Mozambicains, des Malgaches.), ses deux récentes créations présentées à Annecy font l'effet d'uppercuts - sans méchanceté.
Agonie. Ce sont des paroles d'agonie. L'Epilogue des Noyés aborde la question des voyages au bout de la nuit de clandestins de radeaux de fortune. Le narrateur se noie. Il ne saura pas si c'est dans son sang ou la mer. Pour mettre en scène cet Epilogue, Thierry Bédard réunit les spectateurs dans le noir, sur un bout de scène aux airs d'îlot. Le clandestin est tenu par le danseur Hamza Hamada Mounir. Danse de soumission révulsée. Un film, de Frédéric Bouvier (tourné au large d'Anjouan et Mayotte), fournit le cadre. Un homme, enfant au dos, titube dans la nuit. Le tout est peut-êt