C'est du grand Maguy Marin, énorme, excessif. Une seule soirée au Festival de danse de Cannes et l'on est nourri pour l'année. La directrice du Centre chorégraphique national de Rillieux-la-Pape (banlieue de Lyon) avait préparé son coup. Dernièrement, elle avait signé des pièces rageuses, méchantes bien que toujours adressées aimablement au public. Dans Umwelt, le vent balayait tout, le plateau n'était plus qu'une poubelle, les danseurs retranchés à l'arrière-scène. Dans Ha !Ha !, les rires fusaient avec une question essentielle : peut-on rire de tout et avec qui ? même des blagues racistes ?
Avec sa nouvelle pièce, Turba, qui prend certains de ses appuis sur les textes et chants de Lucrèce, philosophe et poète latin, Maguy Marin signe avec le musicien Denis Mariotte, sans oublier Judicaël pour les lumières et sa complice Montserrat Casanova pour les costumes, un vrai film, une vraie pièce, une vraie chorégraphie.
Aucune danse, diront ceux qui ne la comprennent que lorsqu'elle bouge, déplace les corps d'un point à un autre avec élégance. Cela ne gêne nullement. Ici, les onze danseurs de la compagnie comprennent le corps autrement que bondissant. Sous des perruques, des déguisements, des fards, ils sont toujours autres. Ils simulent, Ils sont simulacres.
Cochonnes. Même les miroirs n'osent plus renvoyer leur image. Ils ne savent plus tenir le rôle de l'acteur, du danseur ou du comédien. Ils sont des deuxièmes rôles, des doublures, des figurants, des hallebar