Attention : luxure. Prudence : désir. Alerte : concupiscence. Quelle que soit la traduction retenue pour Lust, Caution, on ne pourra pas dire qu'Ang Lee ait ménagé l'avertissement. Il n'est pas mensonger : l'amour interdit qui unit une jeune révolutionnaire clandestine chinoise et un important chef militaire à la solde de l'occupant nippon dans le Shanghai des années 1940 est un amour éminemment sexuel. C'est bien «la chose» qui mène le film et c'est en son nom seul que s'explique l'injustifiable liaison : ennemis politiques, traîtres réciproques, les deux amants ont pour mission une élimination mutuelle que leur aimantation sexuelle les empêche d'accomplir. Ils déplacent ainsi l'affrontement sur la scène d'une chambre de toutes les torpeurs, enclenchant une mécanique sado-maso d'autant plus torride qu'Ang Lee la filme presque frontalement, avec toute la candeur et l'impudence d'un enfant émerveillé.
On connaissait déjà le potentiel de sensualité qui vibre sous la chair de Tony Leung ; on découvre ici celui de la méconnue Tang Wei, qui ne devrait pas le rester longtemps. Elle est le répondant féminin au mâle déboussolé qui lui fait face, portant elle-même au coin du regard un trouble permanent.
Cette passion n'est pas intimiste pour autant, elle se déroule au contraire dans le cadre épique d'une fresque historique grand genre. Les autorités chinoises ayant laissé au cinéaste les clefs des studios immenses et flambant neufs de Shanghai, la reconstitution de la ville à son époqu