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Libération
Critique

Serge Ricci démultiplié

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publié le 12 avril 2008 à 3h04

Serge Ricci n'a jamais eu une grande visibilité dans le monde gardé de la danse contemporaine. Pourtant, à plusieurs reprises, il a livré des doutes et des affirmations qui démontraient sans faillir que la création chorégraphique peut encore bousculer un monde dominé par les effets de masse. Le danseur chorégraphe mise sur le singulier. Sa récente création, le solo Par-dessus bord, renvoie en exergue à une phrase du philosophe Edmond Jabes : «La distance qui nous sépare de l'étranger est celle-là même qui nous sépare de nous.» Pour mieux le prouver, Serge Ricci se met dans la peau de multiples personnages.

Seul, comme un acteur de péplum jouant un empereur décavé, comme un bâtisseur du pire, il touche par sa danse intuitive, sans canevas. Ressemblant monstrueusement aux personnages dénaturés des tableaux d'Arcimboldo, il pourrait tout autant figurer dans un ballet du Bauhaus, avec les plis des cartons lui servant de carapace. Passant d'un état à un autre, métamorphosé à chaque fois que le spectateur pense qu'il a trouvé sa forme définitive, Ricci révèle les multiples facettes de son identité. Il est le prince déchu du ballet, le déçu de la danse contemporaine, la fée Carabosse de Léon Bakst.

Dans cette pièce peu commune, burlesque et onirique, celui qui s'affirme«clandestin» à lui-même n'est plus qu'un personnage erratique, sans rien d'autre pour le guider que la solide équipe de la compagnie Mi-octobre. L'artiste n'est pas loin de suffoquer dans l'atmosph