Jadis reléguée à l’espace privé, la nudité ne s’est jamais tant exposée dans la société qu’aujourd’hui. Juriste, spécialiste des questions sexuelles, Marcela Iacub retrace dans son dernier livre, Par le trou de la serrure, l’histoire de la pudeur publique. Et nous démontre comment notre liberté sexuelle est limitée par la loi, via le regard des autres. Au XIXe siècle, la sexualité qui s’affichait en public était réprimée. Qu’appelez-vous, dans votre livre, le «mur de la pudeur» ? A cette époque, tout geste érotique était interdit dans la rue mais on pouvait tranquillement organiser une soirée de débauche chez soi. L’article 330 du code pénal de 1810, qui définissait l’outrage public à la pudeur, départageait l’espace en deux. Dans les lieux publics, les manifestations érotiques ou de nudité, gestes obscènes et relations sexuelles, étaient interdits tandis que, dans les lieux privés, la sexualité était libre et montrable. Sans le dire explicitement, l’article 330 respectait la vie sexuelle des individus : il ne s’en mêlait pas tant qu’elle ne venait pas s’afficher en public. Le mur de la pudeur était donc une barrière que l’Etat avait érigée contre sa propre volonté de contrôler et de pénaliser la sexualité. Comme s’il disait, je ne punis pas parce que je m’interdis de voir et de savoir, autrement, je le ferais. Certes, cette barrière implique une limitation pour les individus : ils ne pouvaient pas vivre leur sexualité « en public ». Il s’agit bien d’une forme de libéralis
Interview
« Il faut savoir jouir dans la loi »
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par Cécile Daumas
publié le 10 mai 2008 à 3h34
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