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Libération
Critique

Charles et Léo, dernier bouquet

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publié le 24 mai 2008 à 3h35

Combien un poème peut-il accueillir de musiques ? Plusieurs, selon la Sacem. En 1997, Jean-Louis Murat clôturait son album Dolorès par un texte de Baudelaire, Réversibilité. Onze ans plus tard, on découvre la version qu'en avait faite Léo Ferré vingt ans plus tôt. On ne peut soupçonner le premier de s'être inspiré du second : ce Baudelaire de Ferré était resté inédit depuis cet été 1976 - ou l'hiver suivant ? quand il s'attaquait pour la troisième fois aux Fleurs du Mal.

Le lien invisible entre Ferré et Murat continue de s'étirer. Six mois après avoir confié ces «Ferré-Baudelaire» à Murat (Charles et Léo, 2007), Mathieu Ferré, fils aîné du chanteur, devenu responsable du catalogue maison, en publie l'intégralité : 21 Fleurs du Mal en musique, telles que couchées dans l'atelier-studio du poète en Toscane.

Elles sont, bien sûr, très différentes. Aucune batterie, ni guitare, ni synthé ; ce sont des mises à plat piano-voix, avec ces arpèges qui impriment la marque de l'auteur de Poètes, vos papiers ! Mais on y retrouve l'essentiel : mélodies, basses, accords. Ce qui se présente sous un jour âpre est mieux qu'un témoignage, comme les Ferré en regorgent dans cette maison à une demi-heure de Florence. Avec le son d'un micro et d'un magnéto posés au-dessus d'un piano d'outre-tombe, les Fleurs du Mal, suite et fin, avec ses notes lointaines et ses plantades, est un disque où la prairie de Murat a disparu au profit d'une terre arid