Malgré un soleil qui prêtait à l’alanguissement, la vingt-troisième édition du Festival international de mode et de photographie de Hyères (Var), fut marquée fin avril par le travail sombre et conceptuel d’une Autrichienne de 23 ans, Isabelle Steger. Mine sérieuse et teint pâle, cette benjamine de la sélection (dix candidats venus des Etats-Unis, de France, d’Argentine, de Thaïlande ou de Belgique), s’inscrit dans une lignée austère. Celle, pour faire simple, de l’école belgo-allemande par opposition à l’italienne ou à la française, plus colorées et « légères ». Eventail chromatique réduit aux gris et noirs, coupes amples et asexuées en forme de manteaux zippés ou de cabans-robes, les vêtements selon Steger sont autant de déclinaisons critiques de l’uniforme urbain, postindustriel. On se croirait parmi des moines-soldats sortis de 1984 d’Orwell (l’Autrichienne est née cette année-là), ou à l’ère des balbutiements de la musique électronique selon Devo ou David Bowie – à l’époque de Low. Une sorte de no future qu’Isabelle Steger, qui étudie à Vienne et fut l’élève de Véronique Branquinho et Raf Simmons, voit au contraire comme une libération : « Imaginer une alternative à la beauté qui échapperait, pour une fois, aux impératifs de la mode contemporaine : le commercial et le “sexy”. » Sa collection, baptisée « iTrue » d’après un texte de l’écrivain de Génération X Douglas Coupland, peut également être perçue comme un reflet glaçant des années 00 dans leur aspect le plus étriqué
Isabelle Steger, monastère amer
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publié le 7 juin 2008 à 3h42
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