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Critique

La mémoire d'Hadrien revisitée

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publié le 30 août 2008 à 4h48

Un faux a été placé au coeur de cette exposition consacrée à Hadrien (76-138), qui dirigea l'Empire romain les vingt dernières années de sa vie : une statue, qui vient d'être réexaminée, le montrant l'air songeur en un ample manteau grec. L'intellectuel typique, puisant son savoir dans la sagesse de cette ancienne civilisation. Seulement, elle a le défaut d'être unique en son genre. Les ateliers, qui répandaient par milliers les effigies de l'empereur jusque dans les confins les plus reculés, obéissaient à une codification stricte. Il ne pouvait être représenté que sous trois formes : en uniforme militaire, en toge, ou nu, assimilé à un dieu.

Fausse image. A bien la regarder, la tête est trop petite, et sa position tordue. En fait, elle ne correspond pas au corps (une main, aussi, est bizarre). Ces éléments avaient été exhumés en 1861 à Cyrène (en Libye). Parvenus au British Museum, ils avaient été collés ensemble avec une bonne dose de plâtre. Et d'inconscience. Hadrien n'a jamais été sculpté ainsi. Or, cette fausse image se retrouve dans tous les manuels, entretenant la vision d'un prince savant, née de la Renaissance. Elle survit difficilement à la confrontation avec une autre statue, une vraie celle-ci, retrouvée en Crète. L'effet est radical. Hadrien est figuré en commandant en chef redoutable, la cuirasse décorée des attributs de la puissance romaine, écrasant de son pied un pauvre barbare désarmé. Même la barbe bouclée, typique des portraits de cet empereur, est sujett