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Libération
Interview

Consommer, c’est du boulot

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Selon la sociologue Marie-Anne Dujarier, le commerce en ligne et les sites de socialisation, tout comme le self-service, font travailler le consommateur à la place de l’entreprise. Des tâches non payées, parfois même payantes. Interview.
publié le 6 septembre 2008 à 4h53

Et si le consommateur, au lieu d’être un client-roi était surtout un travailleur ? C’est la thèse de la sociologue du travail Marie-Anne Dujarier dans Le Travail du consommateur, livre qui vient de sortir aux éditions La Découverte. Sans toujours s’en rendre compte, le consommateur est mis à contribution pour coproduire ce qu’il achète. Une nouvelle forme de travail théorisée depuis une vingtaine d’années par les services marketing des entreprises et qui brouille les repères de l’emploi classique. Le consommateur est-il un travailleur qui s’ignore ? Quand un client achète un ticket de train par Internet, il n’a pas le sentiment de travailler. Pourtant, avec l’automatisation des services, il est amené à se servir par lui-même. En achetant seul son billet, il réalise une partie du travail de l’agent de voyage. De même, chez McDo, il remplace l’employé quand il passe sa commande directement sur une borne. Ce self-service est rendu possible par une extension du taylorisme à la relation de service. Les entreprises découpent le processus de production en actions si simples qu’elles peuvent être accomplies par un amateur. Selon ce modèle, elles externalisent sur le consommateur les tâches, comme, par exemple, se servir de l’essence ou scanner ses produits au supermarché. Cette coproduction entre prestataires et consommateurs est explicitement au cœur des stratégies des entreprises d’aujourd’hui, qu’il s’agisse de banques, de loueurs de voiture ou de cinémas. Dans ce modèle « d’aut