Il est trois heures de l’après-midi, Paris grille sous le soleil, les volets de l’appartement sont mi-clos. Une petite coupe de champagne lui ferait plaisir. « J’en ai besoin », dit-elle. Yves Saint Laurent vient d’être enterré et Ingrid Caven, chanteuse allemande, égérie des années 70, se souvient du fourreau que le couturier lui a taillé à même la peau. Elle sort d’un placard à porte coulissante une longue forme noire protégée d’un plastique de teinturier. « C’est comme une robe en peau d’animal, dit-elle. Je peux tout faire avec : me coucher sur le piano, me relever, elle ne perd jamais de son élégance. De Paris à New York, je la portais pour les concerts. Elle a beaucoup voyagé en avion ou dans un coffre de voiture sans jamais prendre un pli. Cette robe n’est pas normale, elle est un sortilège. » « Horreur du sérieux ». Comme une jeune fille à l’allure vive, Ingrid Caven porte, jambes nues, une jupe noire à la découpe asymétrique. La taille est menue, les épaules étroites. Aux pieds, des compensées rose fuchsia. Elle ne ressemble en rien à ces divas qui égrènent leurs souvenirs, avec affectation ou nostalgie. « Yves voulait être de son temps. Avec lui, nous n’étions jamais dans le rétro, toujours dans le moment présent. » Soucieuse de ne pas trahir une personnalité disparue, elle préfère évoquer l’énergie du couturier plutôt que sa fragilité. « Il avait un immense appétit de vivre et de s’amuser. Mais comme le dit la psychanalyste Mélanie Klein, c’est souvent après une p
La diva et le prince couturier
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par Cécile Daumas
publié le 6 septembre 2008 à 4h54
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