Depuis le début du mois, le Nigérian Fela Anikulapo Kuti, roi de l'afro-beat et politicien mégalo-mélomane, mort du sida en 1997, voit pour la première fois le fil de sa vie dévidé dans un music-hall de New York. Mis en scène par le chorégraphe de renom Bill T. Jones, le show Fela ! échappe aux qualifications d'usage (comédie musicale ? biopic ? pièce de théâtre ?) et tranche avec les grosses productions de Broadway, calibrées grand (et blanc) public (Grease, Mamma Mia !, Billy Elliot.).
Veille d'exil. Pendant deux heures quarante-cinq, mêlant danse, musique live et vidéo, rien n'est omis : ni les dictons en patois nigérian, ni les effluves de fumée suspecte exhalée sur scène par un Fela plus vrai que nature. Dans un pays qui fait peu de cas des langues africaines et qui traque la nicotine jusqu'aux abords des immeubles, on n'est pas loin du sacrilège.
Contournant l'écueil récurrent du biopic - résumer une vie en trois heures -, Fela ! maintient une unité de lieu (le club du Shrine à Lagos) et de temps (une nuit de 1977). Harcelé par le régime, plusieurs fois emprisonné, Fela est alors à la veille d'un exil au Ghana. Ivre de rage mais l'ego intact, il évoque la figure de sa mère et soliloque sur la vie, les femmes (il en a épousé 27 en un seul jour ) et son rang de «Black President» qu'il s'est décerné après deux candidatures à la présidentielle nigériane.
Hommage. Les musiciens new-yorkais d'Antibalas ont beau effeuiller avec brio le réperto