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TRIBUNE

«Le Deuxième sexe», une machine de guerre intellectuelle

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par Belinda CANNONE, 0
publié le 26 décembre 2008 à 6h51

il y a deux façons de faire progresser le savoir. L'une est cumulative : elle agit par enrichissements des données qui permettent de nouvelles synthèses. L'autre procède par changements de paradigme - par bonds intellectuels. Affirmer «On ne naît pas femme, on le devient» relève de ce deuxième mode. Une fois le paradigme déplacé, quelque chose est définitivement modifié dans la pensée. Mais il faut ensuite que ce nouveau savoir se transmette aux comportements et aux mœurs.

Pour le féminisme, ce travail pratique aura été entamé par les générations des années 60 et 70. Il n’est pas terminé mais intellectuellement, le cadre qui permettait de repenser le féminin a été posé par Simone de Beauvoir en 1949.

Trois mouvements intellectuels ont permis ce déplacement :

- Premier mouvement. D'abord, un renversement du biologique et du social : s'appuyant sur la pensée existentialiste qui posait la priorité de l'existence sur l'essence, Simone de Beauvoir affirme que le «devenir femme» (la culture) l'emporte sur le «naître femme» (la nature). Aux très anciens arguments limitant la femme à sa seule identité physiologique, laquelle lui tenait lieu de destin (Tota mulier in utero, affirmait Hippocrate, [toute la femme est dans l'utérus, ndlr]), elle oppose l'idée d'une construction historique. Car devenir femme n'est pas seulement le résultat d'un développement individuel, c'est aussi celui de l'inscription dans le mouvement de l'histoire. Et dès lors qu'on c