J’ai embarqué dans Sarkozy par une après-midi de chien. Nicolas avait lancé un raid sur une petite ville du Nord et cela ressemblait à un hold-up qui a mal tourné. A la sortie, des flics partout, des tireurs sur les toits. Des cris hostiles. Nous nous sommes fait conduire sous la menace à l’héliport. L’appareil commençait à s’élever quand nous avons relâché le sous-préfet. Il a roulé dans l’herbe et a fini dans une flaque.
Tous n’auront pas sa chance et regretteront d’avoir fait l’ENA. Le plaisir d’arracher tous ses boutons sur le front des troupes à un beau spécimen de la préfectorale, un officier supérieur ou un divisionnaire : mon meilleur souvenir de quand j’étais Sarko. J’appelle cela mes saintes colères. Sur la palette de mes courroux, des rages froides. J’ai le regard gelé, la lèvre mince, mes sourcils sont les ailes d’un rapace et mes maxillaires broient les petites noix de toutes ces couilles molles. C’est du moins ce qu’on me dit : l’avantage d’être Sarkozy, vous voyez très peu Sarkozy. Sinon le matin, au miroir, quand je me rase en pensant à 2012 et à tous les obstacles qui m’en séparent. En particulier 2010 et 2011.
Le jour se lève, Carla repose, tout se tait dans le quartier de haute sécurité où j’habite. J’ai déjà mis ma rate au court-bouillon et rechargé mon portable en faisant claquer la culasse. Le mobile est le doudou des extravertis, mais aussi une arme de poing redoutable. Un peu d’after-shave, l’occasion de me donner des claques, et qu’aperçois-je soudain