Séquestration de patron. Je vis dans cette crainte. Je suis, après tout, le premier et l’unique vrai patron de France : par conséquent je suis la première cible de tous les chômeurs. Je sais que ça a été inventé exprès pour moi. Y a-t-il pire que revivre ces jours terribles où j’étais collé à l’école ; les autres jouaient aux échecs sous un magnifique soleil à l’extérieur tandis que moi, à l’intérieur, je récitais les verbes anglais de ma voix fluette d’écolier ? Je n’aime pas la façon dont ma secrétaire me regarde, ni cette façon qu’elle a de chuchoter avec le ministre des Affaires étrangères, pas plus que les airs que prennent ces gros durs de militaires, avec leurs gros pieds et leur grosse pomme d’Adam. Ils ont l’air de penser qu’il leur suffirait de tourner la clé, de bloquer rapidement la porte avec le bureau pour me faire prisonnier. Patron séquestré. Ensuite ce serait : on baisse la tête et on tire la chasse comme à l’école. L’omniprésidence, c’est ma meilleure défense. Tout le monde sait que je suis partout : donc je ne suis jamais nulle part. Quand je suis censé travailler au cabinet, en fait je parle à la presse. Quand on sait que je suis dans un ministère, j’explore les problèmes de la vraie vie dans un salon de coiffure très cher des Champs-Elysées. J’ai ouvert plusieurs bureaux dans différents bâtiments et dans chacun, j’ai négligemment posé une veste sur le dossier d’une chaise et j’ai laissé un attaché-case ouvert sur la table de travail. Quiconque passerait
Série
Et puis je veux des missiles, comme James Bond
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par Nigel BARLEY
publié le 21 juillet 2009 à 6h53
(mis à jour le 21 juillet 2009 à 6h53)
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