Chaque semaine ou presque, un parcours de minigolf rend l'âme sous les pelles et les pioches. Ringard, désuet, infoutu de produire un rendement de 12 % sur le capital investi. Et puis, il faut bien faire de la place aux parkings, aux supermarchés et aux musées d'art contemporain ! C'est une discrète hécatombe : ces châteaux, moulins, puits, nains et Blanche-Neige en plâtre périssent dans un hurlement muet ; tout un patrimoine d'art brut est décimé sans jamais avoir été recensé. Car, étrangement, l'inventaire supplémentaire des monuments historiques reste résolument imperméable à ces témoignages architecturaux et sociaux des années les plus douces du XXe siècle.
Aussi faut-il vous dépêcher de profiter du moulin à eau qui orne la piste 18 du parcours d'Houlgate (Calvados), qui n'est sans doute pas là pour l'éternité. Il s'agit d'un édifice d'apparence modeste, mais qui nourrit secrètement de grandes ambitions. Logis à colombages, roue qui ne demande qu'à tourner, évocation de toit de chaume, esquisse de rivière figurée par un elliptique trait de peinture bleue : il y a, dans ce minimalisme, comme un subtil élan vers une Normandie fantasmée, qui n'aurait connu ni le Débarquement ni l'autoroute A 13. De plus, l'obstacle est intéressant car difficile à franchir en un coup, se situant juste après un coude de la piste (un dogleg gauche).
Si la direction de l'inventaire général du patrimoine culturel de Basse-Normandie avait la soudaine idée de documenter l'édifice