Denis Podalydès raconte sa vie en Harpagon.
Avez-vous des souvenirs de l’Avare ?
Je découvre la pièce à 8 ans. Mon frère en a 11 et doit jouer en classe la première scène d'Harpagon, «Hors d'ici tout à l'heure…». Je l'aide à répéter en jouant La Flèche, on s'amuse. Je découvre le mot «avare» en même temps que la pièce. L'avare, pour nous enfants, c'est celui qui ne donne pas de sous, et un vieux qui hait la jeunesse. On trouve aussitôt des équivalents dans la famille. Plus tard, je vois la pièce au théâtre Montpensier, à Versailles. Harpagon est joué par Georges Toussaint. Je me souviens de son rire égrotant. Je ne ris pas, mais je ris peu au théâtre.
Pourquoi jouer Harpagon ?
Harpagon, c'est le méchant, les acteurs aiment jouer le méchant. Il fait rire et peur. Quand je préparais le rôle, j'ai vu Inglourious Basterds. Le méchant, c'est ça : cet extraordinaire acteur autrichien, Christoph Waltz, qui ne jouait quasiment que dans des téléfilms allemands. On sent qu'il s'est réjoui dans ce rôle de nazi, transcendé.
Quand votre Harpagon écoute, il ne bouge pas. Il fait peur comme un oiseau.
Un avare doit tout écouter, tout voir, tout percevoir, tout calculer. Il est sans cesse menacé par les autres. Il ne peut être que dans une écoute fixe. Or, tous ces gens qui ont une écoute fixe sont inquiétants.
Comment avez-vous préparé le rôle ?
J'ai d'abord étudié la longue chaîne des acteurs qui l'ont joué. Notamment Grandmesnil, au XVIIIe siècle, qui était habillé comme moi. Et bien sûr Michel Aumont, qui l'a joué à la Comédie-Française, dans la mise en scène de Roussillon, de 1969 à 1989. Roussillon introduit la dimension balzacienne de