C'est rue des Canettes que se trouvait jadis le centre de la bohème parisienne. «Tous ces jeunes gens sont plus grands que leur malheur, disait Balzac, au-dessous de la fortune, mais au-dessus du destin.» Les fast-foods ont depuis longtemps remplacé les poètes maudits, mais il reste toujours, rue Princesse, cette ancienne épicerie où les amateurs d'absinthe venaient s'unir à la fée verte. L'épicerie s'appelle aujourd'hui Chez Castel : le club le plus fermé et select de Paris. Avec Thibault, qui ressemble au jeune Shakespeare, nous avons la bonne idée de venir habillés en Aristide Bruant, écharpe rouge de rigueur. Le sémillant Dan Marie Royer y fête son anniversaire avec ses princesses. Elles sont très belles, de quoi réconcilier Robespierre avec la monarchie, le mercredi au moins. «J'ai 38 ans, affirme Dan Marie, mais je sors depuis quarante ans.» Nous déambulons avec nos dégaines de poètes décadents dans les riches salons de velours. J'aperçois en haut d'un escalier, assis devant une petite table, le vénérable Pierre Bénichou, auteur d'une fameuse enquête sur le masochisme. En face de lui, telle une madeleine de Proust, un petit citron coupé en deux est posé sur une soucoupe. Il ressemble à un petit sein. Dan Marie me présente une princesse hip-hop, une princesse Soraya puis un homme du CAC40 qui tombe comme un cheveu dans la soupe. Je cours me réfugier dans le regard rêveur de la belle Rachel pendant que Carleen et Florence tournoient s
Masochisme, citron, et madeleine de Proust
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par Tristan RANX
publié le 13 février 2010 à 0h00
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