Les photos de ce cahier spécial sont à la fois exceptionnelles et dérangeantes. D’abord, la plupart sont inédites, personne ne les a vues. Ensuite, elles dévoilent le regard de la propagande allemande sur la France occupée durant la Seconde Guerre mondiale. Pendant plus de soixante ans, elles ont attendu dans les archives allemandes, à Coblence, à Nuremberg et ailleurs, que quelqu’un les sorte des dossiers. C’est maintenant chose faite : pendant trois ans (lire page VIII), elles ont patiemment été réunies, identifiées, puis interprétées par l’historienne Cécile Desprairies avec qui nous avons réalisé ces pages.

En les regardant, on a parfois du mal à en croire ses yeux : un bordel allemand installé dans un établissement de bain rituel juif, un autodafé avec fanions SS et croix gammées dans une ville qui a l’air d’être Nuremberg et qui est Thionville, une famille juive en pleurs dans le camp de Beaune-la-Rolande, un tout jeune résistant, encore un enfant, qui vient d’être arrêté, des officiers allemands fumant le cigare sur la terrasse du château des Rothschild… Alors que le 10 mai prochain, on commémorera les 70 ans de l’entrée en France des troupes allemandes, il est temps de découvrir la production des services de propagande de l’occupant. Certaines images sont visiblement posées, construites ; d’autres, apparemment spontanées, montrent des scènes jamais vues de ces années-là. Quand les images de la propagande montrent une population française largement consentante, des égl