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Libération
Critique

DVD: Jean Daniel et Camus, radicaux modérés

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publié le 15 mai 2010 à 0h00

Etre un homme de rupture quand on défend des idées raisonnables. Ce destin paradoxal a été celui de Jean Daniel, à l'instar de celui d'Albert Camus. La «philosophie de midi» de l'écrivain de l'absurde a souvent été moquée - par Sartre notamment - comme une pensée du juste milieu, mi-chèvre mi-chou, un coup à droite, un coup à gauche. De la même manière, le directeur et fondateur du Nouvel Observateur, héritier et continuateur de Camus, adepte d'une politique mendésiste de centre gauche, a souvent été taxé de réformiste et d'humaniste tiède par la partie la plus idéologique de la gauche. Pourtant, face à la folie du monde, cette sagesse, commune aux deux amis des années 50 - à l'époque où l'un était un écrivain star et l'autre un journaliste en ascension - leur a valu sans cesse conflits, combats, affrontements et polémiques.

Cette radicalité de la modération, on en trouve l’illustration dans l’opus que Jean Daniel consacre à Albert Camus, dont il est l’un des spécialistes les plus respectés. Les batailles de Camus, où sa rigueur morale et intellectuelle suscite la colère de tous les extrêmes, le conduisent à une intransigeance de la raison qui en fera, in fine, le vainqueur moral de l’affrontement. Somme toute, dit-on aujourd’hui, avec un sens tardif de la justice, Camus avait raison.

Jean Daniel, dans son film, retrace avec profondeur cet itinéraire de la lucidité. On en retrouve l'esprit dans le numéro de la collection documentaire «Empreintes», qui lui est consacré