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Six pieds sur mer

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[Balades funéraires]. Dernier épisode de notre série. Aujourd’hui, le cimetière marin de Sète, où est enterré Paul Valéry.
publié le 31 juillet 2010 à 0h00

A Sète, le cimetière est marin et Valéry est son parrain. Oh toi le poète, qui arrive du port par la rampe des Arabes (ancienne montée des Bédouins), entre plutôt. Si Georges, l'ancien concierge, était encore là, il enverrait son chien pour te guider. Car, selon de vieux Sétois, il suffisait que Georges siffle son clebs, en lui ordonnant «Paul Valéry !» pour que l'animal, tout frétillant, t'amène derechef à la tombe où le poète natif des lieux (1871-1945) gît en toute discrétion, dans le caveau de son grand-père, Giulio Grassi. Mais dis-toi bien que le Sétois est farceur. Ce lieu n'est pas dédié aux hommes perdus en mer, il est devenu marin en hommage à l'œuvre la plus célèbre de Valéry, Cimetière marin. Dont le clébard de Georges, plus savant que son maître, jappe pour toi un extrait : «Ce toit tranquille, où marchent des colombes / Entre les pins palpite, entre les tombes / Midi le juste y compose de feux / La mer, la mer, toujours recommencée / O récompense après une pensée / Qu'un long regard sur le calme des dieux !»

Poissons

En souvenir de ces vers, écrits pour cet espace où le jeune Valéry venait de Montpellier à pied pour méditer, le cimetière Saint-Charles devint «marin» le 7 août 1945, quinze jours après les funérailles du poète. L'endroit était né en 1680, «pour enterrer les ouvriers morts sur le chantier du môle Saint-Louis», explique Catherine Lopez-Dreau, directrice des archives municipales. Sans Valéry, on n'e