Locarno n'est pas exactement le genre de festival où l'on vient se bagarrer. Le calme tessinois de l'endroit, la majesté de son lac, la belle curiosité de sa cinéphilie inspirent davantage une tenue vestimentaire de semi-vacancier old school, pieds nus dans les mocassins, que le port d'une armure. Il va pourtant falloir serrer les poings, réactiver les vieilles discussions de fin de risotto, juste parce que le 63e festival de Locarno a diffusé samedi dans le grand hall du Fevi (qui doit bien contenir 1 500 spectateurs) un des films les plus émouvants et les plus libres qui soient. Mais ce film, en retour, reçut un accueil violent (sifflets, chahuts, etc.). De ceux qui écrivent l'histoire d'un festival et permettent de recompter ses amis.
Garçon-fleur. De quoi s'agissait-il ? Du septième film d'un garçon qui refuse que son parcours soit dicté par l'idée d'une carrière gérée comme un patrimoine. Lui va où bon lui semble, se métamorphose au coup par coup. Lui, c'est Christophe Honoré, et ce septième film porte un titre de peintre : Homme au bain. Et c'est exactement cela : le tableau d'une âme, et le passage au bain révélateur d'une image pour que derrière apparaisse, renaisse l'homme. Or, l'homme en question est une icône : inconnu du grand public, mais star dans sa niche, il s'agit de François Sagat, acteur de porno gay français dont le look, construit de A à Z sur les codes de la racaille de banlieue, porte les drapeaux de la Fran