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Libération
Critique

«Orly», salles d’entente

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Angela Schanelec capte les regards et les histoires de passagers en transit. Entomologique.
publié le 11 août 2010 à 0h00

Jacques Tati disait : «Je ne m'ennuie jamais en attendant un avion dans un aéroport.» Angela Schanelec a repris cette conviction à son compte en installant son nouveau film à l'aéroport d'Orly. Cafétéria, salles d'attente, boutiques, tous ces lieux de passage où paradoxalement, entre-temps mort et temps perdu, on ne bouge guère.

Dans cet espace de translation, la réalisatrice fait flotter quelques bouchons humains, eux-mêmes en transit de leur existence : couples déjà constitués (mère et fils, routarde et routard), duo en train de se faire ou de se défaire. Des hommes et des femmes. Ils se parlent, se chamaillent, font connaissance, s’avouent des secrets, se manquent, se taisent. Cette distinction est construite sur un fond d’indistinction qui constitue le sidérant suspense du film : dans la houle des passagers de passage, par la grâce d’une caméra baladeuse et balayeuse, on en vient à soupçonner, voire craindre, que toute personne pourrait devenir un personnage. Jusqu’à ce point d’hallucination où on pourrait soi-même reconnaître des visages familiers. Un jeune homme blond, une carte de l’Europe entre ses mains. Une fille seule sur une banquette. Une jeune hôtesse à un comptoir d’enregistrement.

Désir. La caméra les cadre autant qu'elle les traque, comme dotée d'une autonomie d'animal-machine où elle serait la seule, entre persistance et consistance, à décréter la vie ou la mort d'un caractère. Effet d'arbitraire d'autant plus prégnant qu'il est renf