Une petite famille inquiète regardant partir un voilier : une peinture de la Renaissance italienne suffisamment émouvante pour attirer l’attention des conservateurs de la National Gallery, qui l’ont acquise en 1923. Mais des réserves suscitées par les bizarreries de cette composition ont entraîné son envoi au laboratoire, il y a une vingtaine d’années. L’examen a révélé la présence d’un enduit de colle animale artificiellement jaunie, entre deux épaisseurs d’une résine qui se craquelait comme une peinture ancienne. Mauvais point. La couche picturale fut à son tour analysée, mettant au jour des jaunes de chrome ou de cadmium, du bleu de cobalt, et un vert émeraude synthétiques, parfaitement modernes. Il s’agissait d’une contrefaçon, minutieusement exécutée très peu de temps avant son acquisition.
Prestige. Supercheries, erreurs d'attribution, restaurations catastrophiques, réécritures de l'histoire de l'art, toutes les bêtises des conservateurs et des restaurateurs, et plus rarement leurs éclairs de lucidité, sont alignés dans cette galerie des monstres qu'Ashok Roy, le directeur scientifique du musée de Londres, a bien voulu ouvrir pour notre édification. Il faut le féliciter d'une démonstration mêlant sciences et arts, même si elle souffre de l'alignement d'une quarantaine de tableaux manquant de mise en scène didactique. Dans le cas de ce portrait de famille, il aurait été instructif d'exposer les termes du débat de l'époque. Des doutes avaient en effet été