Menu
Libération
Portrait

L’étoffe d’un Eros

Article réservé aux abonnés
[Excentriques] . Chaque jour, «Libération» part à la rencontre de personnalités hors normes. Aujourd’hui, Sir Richard Burton, infatigable explorateur du XIXe siècle qui parcourut le monde à la découverte d’un continent : le sexe.
publié le 20 août 2010 à 0h00

On ne se méfie jamais assez d'une femme amoureuse. C'est à cause de l'une d'elle, Isabel, que l'on a perdu les écrits intimes et poèmes érotiques de son mari, Sir Richard Burton, qui fut, outre l'un des plus flamboyants explorateurs de tous les temps, l'un des plus extraordinaires défricheurs de ce qui apparaissait, à cette époque furieusement victorienne, comme un continent vierge : celui du sexe. Isabel Burton brûla «avec tristesse et vénération» les récits incandescents de son époux peu après son décès, à 69 ans, en 1890. Un peu plus tard, elle aura ce commentaire (1) : «Va-t-il se lever dans sa tombe pour me maudire ou me bénir ? Cette pensée me hantera jusqu'à ma mort.» Etrange autodafé, qui ne fut même pas motivé par la jalousie. Faut-il croire qu'elle a voulu sauver l'âme du défunt d'une autre incandescence, éternelle celle-ci, qui a pour nom l'enfer ? Ou qu'elle désira que le nom de celui qu'elle considérait comme son seigneur«vive à tout jamais sans souillure et sans tache». En tout cas, et en dépit des 6 000 guinées (somme coquette à l'époque) que lui proposait un éditeur londonien, elle jeta aux flammes le manuscrit nommé The Scented Garden («le jardin parfumé»). Les amis de l'explorateur ne le lui pardonnèrent jamais.

Avec Livingstone, Stanley, Baker et Speke, Richard Burton est, au XIXe siècle, l'un des cinq grands explorateurs anglais de l'Afrique. Mais aucun autre que lui n'a été aussi curieux et érudit, aussi doué