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Libération

«Notre pays ne fleurit pas»

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publié le 6 août 2011 à 0h00

«Chers concitoyens,

Depuis quarante ans, vous avez toujours entendu le premier jour de l’année, de la bouche de mes prédécesseurs, le même discours, avec seulement quelques variantes : comment notre pays fleurissait, combien nous sommes tous heureux, combien nous avons confiance en notre gouvernement et quelles belles perspectives s’ouvrent devant nous !

Je suppose que vous ne m’avez pas proposé à ce poste pour que je vous mente à mon tour.

Notre pays ne fleurit pas. Le grand potentiel créateur et spirituel de nos nations n’est pas utilisé comme il se doit. L’Etat, qui s’appelle Etat des ouvriers, humilie et exploite les ouvriers. […]

Le pire est que nous vivons dans un milieu moral pourri. Nous sommes malades moralement parce que nous sommes habitués à dire blanc et à penser noir. Des expressions comme l’amour, l’amitié, la pitié, l’humilité ou le pardon ont perdu leur profondeur et leur dimension. Le régime au pouvoir jusqu’ici a rabaissé l’homme au niveau d’une force de production […].

Si je parle de climat pourri […], je parle aussi de nous. Nous qui nous sommes tous habitués au système totalitaire, nous qui l’avons accepté comme un fait immuable, donc entretenu par nos soins. Nous tous - bien qu’à des degrés différents - sommes responsables de la dérive de la machine totalitaire. Nous ne sommes pas seulement ses victimes, mais nous sommes tous en même temps ses cocréateurs.

Pourquoi parler ainsi ? Parce qu’il ne serait pas raisonnable de considérer le triste héritage des dern